Le
Soir du 11/05/2007
Social Une étude de l'Ires
Le point figure dans tous
les programmes des partis politiques pour le prochain scrutin. Et suscite des
controverses. Notre système de retraite nécessite des réformes - certains les
veulent radicales, d'autres prônent la prudence. Dans le dernier numéro de
Regards économiques, des économistes de l'UCL proposent leurs pistes de
réflexion. Selon eux, la réforme devra concerner « des éléments essentiels
du système : les taux de cotisation, le montant des prestations et l'âge de
départ à la retraite ».
David de la Croix et Pierre Pestiau
dégagent trois axes. D'abord, il faut accroître le taux d'activité des
travailleurs âgés. « Ce sont les pays qui prépensionnent le plus qui ont
aussi le taux de chômage le plus élevé, disent-ils. Retirer des
personnes du marché du travail n'améliore pas la situation du marché du travail
mais pousse au contraire les salaires à la hausse et, à terme, détruit des
emplois. » Deux solutions : la suppression des systèmes de prépension
explicites et implicites, ou l'introduction d'une réduction d'impôt,
croissante, dès 55 ans. Le travail serait, de la sorte, rendu plus attractif,
tout en préservant un système de prépension « qui répond clairement au
besoin d'une partie de la population ».
Deuxième recommandation : « Il faut
garder au système son caractère redistributif, qu'assurent les plafonds et les
planchers de prestation. » Pour de la Croix et Pestiau, le taux de pauvreté
et l'indice d'inégalité chez les personnes âgées ont fortement baissé au cours
des dernières décennies. C'est un signe du caractère redistributif des soins de
santé et des retraites. Le relèvement de l'âge légal de la pension menace-t-il
les ménages les plus pauvres, comme le jugent certains ? Les chercheurs ne le
pensent pas. Selon eux, cela permettrait « de réduire la pauvreté et les
inégalités de revenus chez les personnes âgées. En l'absence de relèvement de
l'âge de la retraite, une réduction de prestations sera inévitable. Et elle
impliquera nécessairement une réduction des minima sociaux. »
Corriger les inégalités
Dernier constat, illustré par notre
infographie : les femmes âgées et isolées ont les taux de pauvreté les plus
élevés avant et après transferts. De plus, la réduction relative du taux de
pauvreté n'est pas plus forte pour les femmes que pour les hommes. Faut-il pour
autant aller plus loin que le relèvement régulier de la retraire minimale ?
Non, répondent Pestiau et de la Croix. « Le combat pour l'égalité des
traitements et surtout pour l'égalité des chances entre hommes et femmes doit
se placer à un autre niveau, celui de l'éducation et du marché du travail. »
Le système de retraites ne peut pas corriger toutes les inégalités, dont celles
entre hommes et femmes. Ce qui importe, c'est de maintenir un revenu de
remplacement décent et lié à l'évolution du coût de la vie et de garantir un
minimum de subsistance à toute personne n'ayant pu contribuer suffisamment.
MICHEL
DE MUELENAERE
L'Echo-Actualités (2007), 11/05/2007:
Le
«Pacte entre générations» n'est pas encore «digéré» par tout le monde. Mais,
déjà, deux économistes de l'Ires (Institut de recherches économiques et
sociales de l'UCL) plaident pour une nouvelle réforme de notre système de
retraites. C'est indispensable pour assumer le vieillissement de notre
population, expliquent-ils.
Les deux chercheurs plaident pour une augmentation du taux d'activité des
travailleurs âgés. Et ils cassent quelques idées reçues. Non, rehausser le taux
d'emploi des aînés n'aura pas d'effet négatif sur l'emploi des autres
catégories de travailleurs. «Les pays qui prépensionnent le plus ont aussi le
chômage le plus élevé», soulignent-ils. Et de suggérer notamment des incitants
fiscaux pour maintenir les seniors sur le marché du travail.
a Lire en page 9
L'Echo-Actualités (2007),
11/05/2007:
Social
Pour deux économistes de l'Ires, une nouvelle réforme des retraites est nécessaire.
La Belgique ne pourra pas
faire l'économie d'une réforme de son système de retraites. C'est le message
lancé par deux économistes de l'Ires (Institut de recherches économiques et
sociales de l'UCL).
à un mois des élections législatives, le message est clair: le «Pacte de
solidarité entre les générations», un des acquis du gouvernement Verhofstadt,
ne peut être qu'une première étape. Le prochain exécutif devra s'atteler à de
nouvelles réformes. Celles-ci doivent toucher «aux paramètres clés de tout
système de retraite: taux de cotisation, montant des prestations et âge de
départ à la retraite», avancent David de la Croix et Pierre Pestieau,
professeurs d'économie à l'UCL et à l'ULg, dans la revue «Regards économiques».
Or, le «Pacte» avait provoqué deux grèves générales et une manifestation
monstre à l'automne 2005. Il ne faut pas être un expert pour prédire de
nouveaux troubles sociaux si un «Pacte bis» devait voir le jour. Justement, les
deux économistes estiment que «la résistance aux réformes vient en partie d'une
incompréhension des mécanismes économiques». Ils se sont donc attelés à casser
quelques idées reçues.
Dont celle-ci: «accroître le taux
d'activité des travailleurs âgés ne peut qu'aggraver le problème du chômage».
Autrement dit, les «vieux» qui restent au travail prennent la place des
«jeunes». Faux, martèlent David de la Croix et Pierre Pestieau. «Ce sont les
pays qui prépensionnent le plus qui ont aussi le chômage le plus élevé. Retirer
des personnes du marché du travail n'améliore pas la situation du marché du
travail mais pousse au contraire les salaires à la hausse, et, à terme, détruit
des emplois. De plus, mettre les gens en préretraite requiert de relever
l'impôt (ou les cotisations sociales) pour financer leurs allocations, ce qui a
un effet désincitant pour ceux qui travaillent», argument les économistes.
«L'économie n'est pas un autobus pourvu d'un nombre fixe de places»,
tranchent-ils. Pour la même raison, le départ à la retraite de la génération du
baby-boom ne réduira pas automatiquement le chômage, ajoutent-ils.
Incitant fiscal
«Il faut accroître le taux d'activité des
travailleurs âgés, cela n'aura pas d'effet négatif sur l'emploi des autres
catégories de travailleurs», jugent donc David de la Croix et Pierre Pestieau.
Comment y arriver? On peut bien sûr démanteler complètement les prépensions.
Mais il existe une alternative. «Il s'agirait ici de baisser l'impôt des
personnes physiques ayant atteint 55 ans ou plus, par exemple en augmentant les
déductions pour frais professionnels à partir de cet âge. De la sorte,
l'incitant négatif offert par les prépensions serait compensé par un incitant
fiscal à rester plus longtemps sur le marché du travail. Le travail serait de
la sorte rendu plus attractif, tout en préservant un système de prépension qui
répond clairement au besoin d'une partie de la population», suggèrent les
économistes.
Une réforme des retraites ne vise en rien
à casser des acquis sociaux.
«Quand on souhaite relever l'âge de la
retraite, on ne veut certainement pas fermer les portes de la retraite
anticipée à ceux dont la santé est déficiente ou l'occupation pénible. Ce que
l'on veut, c'est induire ceux qui le peuvent à prolonger leur vie active afin
de cotiser plus longtemps et de bénéficier de leur retraite moins longtemps»,
soulignent encore David de la Croix et Pierre Pestieau. «Il est important de
garder à notre système de retraite son caractère redistributif», plaident-ils.
«Le système de retraite ne peut pas corriger toutes les inégalités que l'on
peut déplorer, telles celles entre hommes et femmes. Ce qui importe est de
maintenir un revenu de remplacement décent et lié à l'évolution du coût de la
vie et garantir un minimum de subsistance à toute personne n'ayant pu contribuer
suffisamment», concluent David de la Croix et Pierre Pestieau. r
Alain Narinx